Gilles Legardinier

"IL FAISAIT NUIT, UN PEU FROID..."

J'aime, J'aime pas

Chaque fois que je rencontre l’une ou l’un de vous, je vis le même décalage. Vous avez passé des heures à me lire, à ressentir, alors que moi, je vous découvre.

Vous me connaissez finalement très bien, vous savez ce qui me bouleverse, ce qui me fait rire, et pour ma part, durant les premières secondes de notre entrevue, à une vitesse phénoménale, je me retrouve à analyser vos propos, vos regards, tout ce que vous émettez, pour essayer de comprendre la personne que vous êtes. Parce que ce qui me tente encore plus que le chaleureux témoignage d’attachement que vous m’offrez, c’est l’échange. Plus je vous connais, plus je comprends ce monde et moins j’en ai peur.

Mes histoires sont un point de ralliement. Entre vous et vos proches, entre vous et moi. Après ces années ensemble, il était temps d’actualiser, d’approfondir, mon « J’aime/J’aime pas », pour que vous puissiez en savoir un peu plus sur l’homme derrière l’auteur. Je ne suis pas là pour vous draguer et vendre, mais pour vivre. Alors, allons-y franchement !

Même quand je n’écris pas, j’aime me lever très tôt, gagner du temps sur la journée, savourer le calme pendant que ceux que j’aime dorment encore et que ceux qui vont me compliquer la vie ne m’ont pas encore retrouvé. Je partage souvent ces moments silencieux avec mon chien, les chats des voisins ou les bestioles plus grosses que je croise en forêt.

J’aime bien l’idée de me coucher tard, mais étant donné mes journées, en général, après 22 h 30, il ne faut rien me demander de sérieux parce qu’à part rire et faire n’importe quoi, je ne suis plus bon à grand-chose…

J’aime avoir rendez-vous, attendre les gens en espérant qu’il se passera quelque chose. Je n’apprécie pas les individus en retard par principe, cela revient à considérer que celui qui les attend n’a rien d’autre à faire que d’être à leur disposition.

J’aime observer les gens, être le témoin discret des moments fugaces où ils sont réellement eux-mêmes. Un regard qui échappe au contrôle, un mouvement qui révèle un sentiment que personne n’est supposé remarquer, un geste qui trahit un talent, un don, que je capte au vol. J’affectionne particulièrement les halls d’aéroport, de gare, les salles d’attente, qui sont tous à mes yeux d’extraordinaires théâtres de vie. Parfois, il m’arrive d’oser aborder des inconnus pour leur dire ce que j’ai admiré l’espace d’un instant, sans enjeu, juste d’un humain reconnaissant à l’autre. Cette réalité rend le monde plus beau et je n’ai jamais été mal accueilli.

J’aime entendre votre émotion quand je vous appelle. J’aime énormément que vous me demandiez de faire des surprises à ceux que vous aimez. C’est sans doute l’aspect le plus inattendu de mon parcours, et celui qui me touche le plus. Je me rends alors compte que je fais un peu partie de votre vie. Me retrouver associé à des anniversaires, des mariages, des complots affectueux visant à émouvoir celles et ceux qui comptent pour vous constitue une vraie joie et un honneur.

J’aime avouer tout ce que j’ai raté, faire rire avec ce qui m’a fait souffrir. Je ne manque pas de dossiers dans ce domaine ! J’espère que cela vous aidera à aller mieux quand vous vous retrouverez dans les failles de la vie où je suis déjà tombé !

J’ai toujours dit que je n’aimais pas la cannelle, c’était vrai jusqu’à ce que je découvre la vraie, directement sur l’arbre, grâce à un Seychellois qui m’a initié. Alors, là, c’est autre chose. C’est exceptionnel de finesse, une expérience sensorielle rare, divine. Rien à voir avec la poussière dénaturée que l’on nous vend et que l’on galvaude en en mettant dans beaucoup trop de plats. Certains trésors ne supportent pas l’exploitation outrancière. Comme le chocolat, dont on nous dégoûte à force d’en fourrer absolument partout. Essayez de ne pas en manger pendant un an et goûtez-y à nouveau, comme une première fois. Je l’ai fait. Vous m’en direz des nouvelles. Cette perception inédite de la cannelle m’a accessoirement enseigné que mes jugements définitifs ne le sont pas. Il suffit de la bonne personne pour les changer.

Je n’aime pas qu’aujourd’hui, lorsque l’on parle d’Amazone (je parie que vous pensez que j’ai fait une faute d’orthographe, c’est terrible !), les gens songent d’abord à un site de commerce en ligne plutôt qu’au fleuve majestueux. Dans le même registre, je déplore que l’on ne considère plus Clio comme la Muse antique de l’Histoire mais comme un modèle de bagnole à vivre à partir de 15 800 euros TTC. Affligeant. J’ai le plus profond mépris pour ceux qui pillent en prétendant créer. Je déteste ceux qui récupèrent pour s’approprier dans le seul but de servir leurs intérêts. Leurs « hommages » sont des vols.

J’aime les gens qui s’engagent sans bruit, parce qu’ils y croient, sans se demander si ce sera bon pour leur image. Je me méfie de ceux qui sonnent faux. J’ai un flair de chien pour ça. Je hais ceux qui s’inventent des personnages comme on lance des filets. D’une façon ou d’une autre, ces gens-là ne vivent que pour piéger des proies.

J’aime les larmes. Peu importe qu’elles soient de chagrin ou de joie. Elles sont l’expression d’une émotion absolue, pure, sincère, tellement humaine. Les larmes de joies sont comme les levers de soleil de l’âme. Les larmes de tristesse sont la plus digne expression d’une peine et parfois, un appel à tendre la main. Dans ces moments-là, les gens ne font plus semblant, et ils sont souvent magnifiques.

J’aime les livres, les films, les chansons qui me changent un peu, qui m’apprennent. Les coups marketing m’ennuient. Les suiveurs m’indiffèrent, les nombrilistes me fatiguent, les copieurs m’attristent. Dans ce monde où trop de gens donnent leur avis, le minimum est de prendre son sujet au sérieux.

Je supporte de moins en moins le cynisme, l’arrogance. Je me fiche du jugement de ceux qui critiquent ce qu’ils ne sont pas capables de faire. On en crève.

J’adore quand une pièce de bois s’insère parfaitement là où elle sera utile. Il y a dans sa mise en place une satisfaction, une jubilation qui me ferait presque oublier le désordre qui règne.

J’aime la musique. Pour moi, c’est plus qu’un art, c’est une énergie brute. Je n’ai aucun style de prédilection, pas d’apriori. Je suis curieux, demandeur. Si ça me fait réagir, j’adopte et je partage. Comme en littérature, je crois qu’il faut aborder la création comme une rencontre, sans œillères et sans faux-semblants. Admettre son goût sans se soucier de ce que certains s’estiment capables de nous obliger à penser.

Je ne sais toujours pas danser, je crois que ce ne sera pas dans cette vie que j’y arriverai. Trop timide, et trop admiratif de ceux qui savent le faire. Je préfère mille fois les observer que mal les imiter. Tellement de choses m’échappent, et je n’ai pas l’envie de tout. Je me considère comme chanceux et je me réjouis de voir que d’autres vont plus loin que moi. Je les accompagne, au moins des yeux.

J’adore les chiens, j’ai une passion pour les chats. Je ne vois pas l’intérêt de séparer en deux camps opposés ceux qui aimeraient les uns ou les autres. J’ai grandi avec des chiens et des chats qui jouaient ensemble. C’est juste génial de les voir, chacun avec leur caractère, se découvrir et s’apprivoiser.

Je n’ai pas peur de la mort. Par contre, l’idée d’être séparé de ceux que j’aime peut me détruire.

Je n’aime pas manger trop chaud. Je dois boire moins d’un litre de vin ou d’alcool par an. Je déteste le lait. Personne ne saura jamais si j’aime ou si je déteste les brocolis. C’est mon secret et je l’emporterai dans la tombe.

Lorsque je reviens d’un long voyage, mon premier acte personnel en rentrant en France consiste à acheter une demi-baguette bien croustillante pour la dévorer dans mon coin comme un animal.

J’aime quand deux personnes qui ne se connaissent pas s’allient pour accomplir, pousser une voiture en panne, porter une charge trop lourde, ou sortir quelqu’un du bouillon.

J’aime me dire que tout est possible si on le veut vraiment. Je ne suis pas naïf, mais j’ai assez regardé autour de moi pour savoir que c’est vrai.

J’adore me dire que je ne sais pas grand-chose et que j’ai encore tant à découvrir.

Faites attention à vous, et surtout, vivez !

signature